Développement durable

À quoi sert la compensation de CO2 ?

Quand on parle d’aviation, il est souvent question de compensation des émissions de CO2. De quoi s’agit-il ? Est-ce vraiment utile ? Ou ne serait-ce pas plutôt un moyen de se racheter une bonne conscience ? Entretien avec Barbara Jossi, Senior Consultant chez Swiss Climate SA.

Qu’est-ce que le CO2 et pourquoi est-ce toxique ?

Le dioxyde de carbone (CO2) est un gaz à effet de serre naturellement présent dans l’atmosphère. Au cours des dernières décennies, les rejets de dioxyde de carbone n’ont cessé d’augmenter dans l’atmosphère, sous l’effet des activités humaines telles que la combustion d’énergies fossiles (charbon, pétrole, etc.) ou le déboisement de vastes superficies de forêts. Ces activités renforcent l’effet de serre et entraînent ainsi un changement global du climat. Cela affecte notamment les espèces animales et végétales, le bilan hydrologique, les niveaux de température et la société.

On entend fréquemment parler de compensation de CO2. Comment est-ce que cela fonctionne ?

La compensation de CO2 ou compensation carbone permet de soutenir, à travers l’achat de certificats, un projet qui économise du CO2 et qui contribue ainsi à la protection du climat. Il peut par exemple s’agir d’un projet visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre émanant d’une décharge, à remplacer les cuisinières à gaz par des modèles solaires pour les familles ou encore à protéger une zone de la forêt tropicale contre le déboisement. Les méthodes de compensation sont nombreuses. Actuellement, ce sont les projets forestiers qui sont très populaires. Au cours de sa vie, un arbre stocke du CO2 dans sa biomasse grâce à la photosynthèse. En l’abattant, on supprime cet effet d’absorption et le CO2 présent dans l’atmosphère ne diminue donc pas. Planter des arbres permet de nouveau de capturer et de stocker du CO2 les années suivantes.

Comment de tels projets voient-ils le jour ?

Les projets de protection du climat sont développés selon des mécanismes spécifiques reconnus par l’ONU, testés par des experts indépendants et certifiés selon des normes internationales. Ils doivent répondre à des exigences spécifiques très strictes. Pour voir le jour, un projet doit impérativement être mené à bien avec l’argent provenant de la vente des certificats. Autrement dit, l’économie de CO2 ne peut être réalisée qu’à l’aide de ces fonds.

« Pour voir le jour, un projet doit impérativement être mené à bien avec l’argent provenant de la vente des certificats ».

De plus, il convient de garantir que chaque certificat ne sera utilisé qu’une seule fois et qu’il ne sera donc pas revendu plusieurs fois. Dès que le projet a été développé, testé par une instance externe et certifié par une norme, les émissions de CO2 économisées peuvent être négociées sous forme de certificats.

Négociées, c’est-à-dire en bourse ?

Absolument. Les certificats peuvent être achetés en bourse, dans des registres ou sur des plateformes. Si vous souhaitez par exemple compenser la quantité de CO2 que vous avez rejetée lors de votre dernier vol, il vous suffit d’acheter la quantité de certificats correspondants auprès d’un courtier. Celui-ci supprime ensuite les certificats sur son registre et garantit ainsi que vous seul pouvez réaliser cette économie.

Est-ce vraiment utile ? Mes miles de vol seront-ils vraiment compensés dans un rapport de 1 à 1 ?

Si le calcul est effectué correctement et que l’organisme de compensation est sérieux, alors la réponse est « oui ». En compensant des émissions de CO2, chaque personne ou entreprise a pour but d’encourager la protection de l’environnement à l’aide de solutions aussi propres et fiables que possible. Il faut pour cela un système qui fonctionne, avec des organes de contrôles agréés, des labels et des standards sérieux ainsi que des partenaires de distribution compétents. Sur ce terreau fertile se développeront des projets de protection du climat qui pourront également faire l’objet d’un examen et d’une évaluation.

« En compensant des émissions de CO2, chaque personne ou entreprise a pour but d’encourager la protection de l’environnement à l’aide de solutions aussi propres et fiables que possible. »

L’argent provenant de la vente des certificats doit contribuer à faire fonctionner ce système vertueux et à garantir que les réductions de C02 seront bel et bien effectives. Les projets de protection du climat favorisent également la construction de routes et d’écoles, permettent à la population locale de participer au processus et améliorent l’approvisionnement en eau et les conditions sanitaires. Cela va bien au-delà de la simple protection du climat.

Est-ce que la compensation de CO2 n’est pas non plus une façon de se racheter et de prendre par exemple l’avion sans avoir « mauvaise conscience » ?

Si, bien entendu. L’idéal serait un monde sans émissions. Malheureusement, même les personnes qui connaissent l’impact environnemental du trafic aérien prennent régulièrement l’avion. Renoncer à ce mode de transport est très difficile. C’est pourquoi chacun devrait commencer par balayer devant sa porte.

« Aujourd’hui, toutes les émissions ne peuvent malheureusement pas être entièrement réduites à un coût abordable. »

Que ce soit en entreprise ou dans notre vie privée, nous devrions tous d’abord veiller à réduire autant que possible nos propres émissions de CO2 et à mettre en œuvre des mesures pour améliorer nos résultats, par exemple en prenant moins souvent l’avion, en renonçant au chauffage au mazout ou en utilisant du papier recyclé. Aujourd’hui, toutes les émissions ne peuvent malheureusement pas être entièrement réduites à un coût abordable, par exemple dans une entreprise de production ou lorsque de fréquents déplacements professionnels dans le monde entier sont nécessaires. Des investissements considérables devraient être réalisés à ce niveau. Il peut donc être utile de compenser ailleurs les émissions résiduelles afin d’utiliser au mieux l’argent disponible. Quant à savoir si les gens se sentent mieux ainsi, le climat ne s’en soucie guère. Seule importe la quantité de CO2 rejetée dans l’atmosphère.

Est-ce que l’avion est vraiment aussi mauvis qu’on le dit ?

Les quantités de CO2 rejetées par les avions sont franchement énormes ! Et comme les prix des billets sont bas, de plus en plus de personnes prennent l’avion. Les coûts des dommages causés par les avions à l’environnement ne sont de loin pas couverts. Selon un sondage, la plupart des personnes seraient prêtes à payer un impôt ou une taxe environnementale sur leurs billets d’avion. Celles qui le souhaitent peuvent aujourd’hui déjà le faire sous la forme de la compensation carbone.

« Les coûts des dommages causés par les avions à l’environnement ne sont de loin pas couverts. »

La compensation doit aussi aider à prendre conscience du problème et à comprendre que le CO2 a un prix. C’est pour moi le point essentiel, que l’on parle de taxe (obligatoire) ou de compensation (facultative). Le CO2 a donc une valeur. Il influe sur le climat et ne doit pas être pris à la légère. En résumé, cela signifie que la compensation carbone combinée à des mesures de protection du climat au quotidien représente un moyen judicieux de protéger le climat.

Comment expliquer les énormes écarts de prix au niveau de la compensation de CO2 ?

Comme pour d’autres biens commerciaux, les mécanismes du marché s’appliquent également à la compensation et à l’achat de certificats de CO2. Les prix varient donc en fonction de l’offre et de la demande. Tout dépend aussi de la quantité achetée : les certificats portant sur quelques tonnes seulement ont des prix à l’unité plus élevés que ceux établis pour de gros volumes. Les coûts varient aussi en fonction de la nature du projet (technologie, pays, taille, standard et qualité). Si vous prenez par exemple un gros projet plus rentable sur le plan économique, qui permet de réduire de plus grandes quantités de CO2 et dont le développement a été optimisé en termes de coûts, alors les certificats sont en règle générale aussi moins chers. D’autres projets de réduction d’émissions plus complexes et coûteux concernant par exemple de petits producteurs dans des zones rurales sont assortis de certificats plus chers.

Comment être sûr, en tant que consommateur, que les émissions de CO2 « achetées » seront réellement compensées ?

Il est important que les consommateurs s’adressent à un courtier fiable jouissant d’une bonne réputation et ayant des références. De plus, certains standards garantissent la qualité des projets et le respect des réductions de CO2 convenues. Les certificats achetés selon ces standards sont généralement fiables. Lorsqu’ils acquièrent des certificats de compensation, les consommateurs devraient en outre demander au vendeur une confirmation attestant que les certificats correspondants seront bien supprimés de son registre, afin d’éviter qu’ils ne soient pas vendus plusieurs fois.

La BCBE compense ses émissions de CO2 dans son propre espace économique. Que cela signifie-t-il ?

Cela signifie que la BCBE soutient un projet de réduction des émissions de CO2 se trouvant dans sa zone d’activité. La compensation se fait ainsi au niveau local et les fonds contribuent à la création de valeur locale.

Plus de détails sur l'écobilan de la BCBE.

Article en collaboration avec Swiss Climate AG

Barbara Jossi

Elle travaille en tant que Senior Consultant chez Swiss Climate SA, où elle est responsable du projet Compensation CO2. Elle s’occupe de la gestion de CO2 pour le compte d’entreprises et conseille les clients dans la mise en œuvre de mesures judicieuses d’économies d’énergie et de CO2. Elle soutient également des entreprises lors du développement et de l’application de stratégies de compensation sur mesure. Barbara Jossi est par ailleurs responsable de la gestion du portefeuille de projets de protection du climat en Suisse et à l’étranger.

 

Date de publication: 04.06.2021

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